Je bégaie et je chante
« On est morts! On est morts! », s’écriait ce garçon alors que je m’apprêtais à chanter ce solo Va mon coeur pour la première fois dans l’amphithéâtre de mon université. C’était à l’occasion du tout premier concert de l’année académique de la chorale universitaire.
Soyons plus patients envers les gens qui bégaient, comme moi – Bérénice Edima
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Mon voisin de la cité universitaire me rapporta plus tard comment cet étudiant, surpris qu’une fille, cette fille-là qui bégaie, prenne le micro devant des centaines de personnes pour chanter on ne sait trop quoi. « Elle va bégayer en chantant, quel embarras! » pourrait-on traduire des propos de ce jeune qui vraisemblablement n’aura jamais rien vécu de tel.
Je bégaie depuis que j’ai 5 ans. J’ai pourtant bien parlé avec cet âge, avec aisance et fluidité. Je ne sais pas trop ce qui s’est passé pour qu’à 5 ans, mon monde bascule et je me retrouve prisonnière de la parole, jusqu’à ce jour. Toujours est-il que le bégaiement fait partie de ma vie, et ce, depuis ma plus tendre enfance. Le bégaiement a contribué à forger mon caractère. Tantôt impulsive, tantôt colérique, tantôt en manque total d’estime personnelle, je suis un peu à la merci de mes émotions. Mais ça s’améliore avec le temps Dieu merci.
J’ai trouvé en le chant un moyen de m’échapper de cette réalité douloureuse qui faisait de moi un enfant à part. Des impossibles lectures collectives à l’école primaire aux exposés oraux à l’université, en passant par la simple conversation routinière, parler est un vrai fardeau pour moi. Et pendant longtemps je m’en suis voulu de ne pas pouvoir être comme les autres: une personne normale.
J’ai cependant trouvé refuge dans la chanson, qui par un procédé inexpliqué rend ma parole libre. La musique me rend libre. Et ne me dites pas qu’il me faut chanter en parlant pour ne plus bégayer, ce n’est pas si simple. C’est plus profond que ça. Sans affecter les capacités mentales, le bégaiement est un trouble moteur du développement qui affecte la capacité de ceux et celles qui en souffrent à communiquer, à s’exprimer.
C’est alors que forte de mes propres peurs et des appréhensions des autres, je me tins debout et je chantai Va mon coeur, devant cette foule d’inconnus qui me dévisageaient, mais aussi et surtout devant ma mère et mon frère qui étaient venus me soutenir pour l’occasion. Et de les voir présents pour moi, tout le reste devient secondaire. Je chantai pour eux.
VA MON COEUR (VA, PENSIERO) de Giuseppe Verdi – Berenice Edima
À la fin de ma prestation et à en croire la réaction des gens dans l’amphithéâtre, ma performance n’a souffert d’aucun hiatus. Ma mère est d’ailleurs venue sur scène me faire un gros câlin, comme pour dire « Elle, c’est ma fille ». Et ça, ça vaut tout l’or du monde.
À l’occasion de la Journée mondiale du bégaiement, célébrée chaque 22 octobre, je souhaite encourager quelqu’un en lui disant: Si comme moi, parler est un fardeau, si tu passes de longues minutes sans pouvoir terminer une seule phrase, si tu as une peur bleue du téléphone, si tu perds tes moyens devant public ou devant un.e inconnu.e, si tu t’es longtemps défini par ton bégaiement, si on s’est moqué de ta façon de parler questionnant tes capacités mentales… Tu n’es pas seul.e, Jésus est avec toi, comme il est avec moi. Il me donne la force de parler aujourd’hui, mieux que je n’aie jamais parlé.
Je dois parler tous les jours dans le cadre de mes activités professionnelles et je m’en sors plutôt bien Mais je reviens de loin! Parler m’était tellement difficile que j’ai déjà souhaité devenir muette, au grand dam de ma pauvre maman. Jésus m’a fait comprendre que la confiance en soi, l’acceptation de soi et de vivre des expériences positives (faire ce que l’on aime, avoir un cercle social sain, etc.) contribue grandement au bien-être et donc à la fluidité.
Jésus m’a donné le courage de ne reculer devant rien, même devant mes propres peurs. D’être courageux, c’est déjà une victoire sur les épreuves. Fais confiance à Jésus. Comme il m’a aidée, il peut t’aider. Je bégaie toujours aujourd’hui, mais je suis plus heureuse que jamais car mon bégaiement fait partie de moi mais ne me définit plus. Les épreuves font partie de la vie mais ne te définissent pas. Tu es fait.e pour les surmonter! Tu es plus que ton handicap! Tu es une personne de grande valeur et tu mérites d’être heureux.se. Travailles à ton bonheur et laisse Jésus faire le reste.
À vous qui avez la grâce de parler normalement, je vous prie d’être patients envers les gens qui bégaient. Vous pourriez être agréablement surpris
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